Pollution des sols européens et atteintes à la biodiversité: L'ambition zéro pollution de l'UE
On estime qu’environ 60 à 70 % des sols européens se trouvent dans un mauvais état en raison de problèmes comme l’expansion urbaine, les faibles taux de recyclage des terres, l’agriculture intensive et le changement climatique. Les sols dégradés sont des facteurs déterminants de la crise climatique et de la biodiversité. D’après la Commission, des sols en mauvais état ne permettent pas aux écosystèmes de jouer leur rôle, ce qui coûte à l’UE au moins 50 milliards d’euros par an.
Le 10 avril dernier, les eurodéputés ont arrêté leur position sur la proposition de directive relative à la surveillance et à la résilience des sols, qui répond aux inquiétudes croissantes des citoyens concernant la pollution des sols européens et les atteintes à la biodiversité.
Les eurodéputés souhaitent l'élaboration d'une définition harmonisée de la qualité des sols européens et leur classement en cinq catégories selon leur niveau de contamination : état écologique élevé, bon, modéré, dégradé et gravement dégradé.
Le texte adopté par le Parlement prévoit également la création d'un registre commun pour recenser les sites contaminés, qui sont estimés au nombre de 2,8 millions par la Commission européenne.
Selon le principe du pollueur-payeur, une fois que les autorités nationales auront enquêté et identifié les sites contaminés, les acteurs à l'origine de la dégradation des sols devront financer leur décontamination.
Cette législation répond aux attentes des citoyens en matière de protection et de restauration de la biodiversité, du paysage et des océans, ainsi que l’élimination de la pollution, telles qu’énoncées dans les propositions 2, paragraphes 1, 3 et 5, des conclusions de la Conférence sur l’avenir de l’Europe.
Un serpent de mer?
Ce n'est malheureusement pas le première fois que la commission tente de d'intervenir sur le sujet depuis une première tentative de directive définissant un "cadre pour la protection des sols” en 2009, rejetée par l'Allemagne, l’Autriche, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et la France, en raison de son coût, et surtout de son débordement sur les compétences nationales.
En avril 2021 le Parlement européen revient à la charge, et rédige une résolution invitant la Commission à proposer un cadre juridique de surveillance et de protection des sols. Ainsi, le 5 juillet 2023, la Commission publiait un nouveau projet de directive.
Plusieurs ONG environnementales regrettent la moindre ambition de ce texte par rapport au projet avorté en 2014.
Dans le même temps, plusieurs États membres ont alerté sur le risque que la directive génère des coûts administratifs importants et ont défendu une meilleure prise en compte des spécificités de chaque territoire, tout en garantissant le respect des compétences nationales, conformément au principe de subsidiarité.
Malgré ces réserves, les États membres et défenseurs du texte soulignent la nécessité de définir un cadre législatif commun, en complément des législations nationales existantes, pour surveiller et améliorer la santé des sols, et ainsi garantir la protection de la biodiversité et de la santé des citoyens, mais aussi la souveraineté alimentaire de l'UE sur le long terme.
Espérons que les états membres sauront cette fois mettre de coté leurs reflexes souverainistes pour négocier et aboutir à l'adoption de mesures indispensables pour rendre ces bonnes intentions effectives.
Prochaines étapes
Le texte sera réexaminé en deuxième lecture par le nouveau Parlement à l'issue des élections européennes afin de trouver un accord définitif avec le Conseil. Une fois adoptée, la directive devra être transposée dans les législations nationales, à la différence d'un règlement, qui s'applique directement dans tous les Etats membres.